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Le site des Nouvelles de
France, magazine conservateur, a publié le 31 août une tribune libre de Falk VAN GAVER et Jacques DE GUILLEBON intitulée Voie sans issue. Ce texte nauséabond s'avère être une attaque en règle contre l'homosexualité faisant la
part belle aux clichés les plus vils. Il appelle une réponse.
Je me suis efforcé de surmonter l'écoeurement et la nausée que chacune des phrases de votre texte, Messieurs, a provoqués en moi pour lire votre tribune de la
première majuscule au dernier point. Je ne résiste pas au plaisir de vous annoncer une bonne nouvelle : nous sommes au XXIème siècle ! Que cela vous laisse indifférents, vous ravisse ou vous
désole, je me sens dans l'obligation de vous apprendre que la société a changé. Certes, quelques-uns, dont vous êtes peut-être, peuvent regretter le bon vieux temps où l'amour n'avait pas encore
fait irruption dans la sphère privée et publique, cette époque lointaine où les mariages s'arrangeaient entre familles et où les couples formés sur la base de la raison plus que du sentiment se
satisfaisaient d'une cohabitation bâtie sur la tolérance réciproque des incartades de chaque conjoint. Monsieur faisait alors semblant de ne pas remarquer les assauts de galanterie que son
épouse réservait à ses hôtes masculins alors qu'elle-même fermait les yeux sur les passages un peu trop fréquents de son mari en cuisine avec la bonne ou même, qui sait ?, à
l'écurie avec le palefrenier. Depuis, les hommes et les femmes qui, me dit-on, ne se contentent plus d'être uniquement des ventres reproducteurs, ont gagné le droit à l'amour. Ils et elles ont
désormais la liberté de ne plus museler leurs sentiments au nom de je ne sais quels intérêts économiques ou quelles convenances sociales qui, jadis, contraignaient leurs aïeux à passer leur
vie entière aux côtés d'une personne pour qui ils pouvaient éprouver de la complicité, de l'amitié ou de l'affection sincère dans le meilleur des cas mais rarement de l'amour. Votre théorie
consiste à faire croire que "l'homosexualité est un faux amour". Si je devais tomber, comme vous le faîtes à chaque paragraphe, dans la plus vulgaire démagogie, il me serait facile de
vous demander quelles expériences vous avez faites de l'homosexualité pour pouvoir la distinguer ainsi du véritable amour... Je ne le ferai pas et continuerai donc à vous ranger dans cette
catégorie surpeuplée des auteurs qui traitent de sujets qu'ils ne connaissent pas.
"La crise de la vache folle, ce n'est pas nous !"
Pour vous, l'homosexualité "est la maladie des peuples fatigués, des siècles décadents, des sociétés finissantes. Rome de la chute de l'empire, Paris de la fin
des Bourbons étaient ravagées d'homosexualité. Elle est le signe avant-coureur des effondrements, des révolutions, des bouleversements, des invasions, des catastrophes". Bon là
effectivement, je dois bien l'avouer : la chute de l'empire romain, c'est nous ! Nous étions tellement occupés à offrir des petites fleurs roses et de jolies toges moulantes à tous ces
beaux mercenaires au service de Rome qu'ils n'ont pas pu atteindre à temps le limes pour y arrêter les barbares qui eux étaient de vrais mecs, poilus, malodorants et sanguinaires. En revanche, je
vous le garantis, la communauté gay qui, selon vous, "relève par bien des aspects du phénomène sectaire" n'est pour rien dans les épidémies de peste bulbonique, dans l'attaque
du phylloxera contre la vigne, dans les sept plaies d'Egypte, dans la famine en Afrique... même la crise de la vache folle, ce n'est pas nous !
"On ne choisit pas d'être homosexuel."
Comme beaucoup, hélas, vous vous complaisez dans une vision caricaturale de l'homosexualité allant jusqu'à estimer qu'elle "n'est pas un état - comme être noir,
blanc, handicapé...- mais une pratique". Là encore, je me dois de vous livrer une information essentielle : on ne choisit pas d'être homosexuel ! On l'est ou on ne l'est pas ! Je n'ai encore
jamais vu un homme ou une femme se lever un matin en se disant "tiens, je décide d'être homoseuel(lle) aujourd'hui". S'il nous était possible de choisir entre homosexualité et hétérosexualité,
croyez-vous vraiment que nous opterions pour la première au risque de nous exposer aux injures, aux propos blessants, aux agressions homophobes et aux tribunes insultantes comme celle que
vous signez ? A-t-on déjà vu des hétéros agressés par des homos pour la seule raison qu'ils sont hétéros ? Même en France en 2012, et en partie à cause de gens comme vous, il est tellement plus
facile d'être hétérosexuel ! Dès lors, l'homosexualité ne devrait plus exister si, comme vous le prétendez, elle n'était rien d'autre qu'un choix. On ne choisit pas plus d'être homosexuel
que d'être grand, petit, blanc ou noir. Ce que l'on choisit en revanche, c'est de vivre ou non son homosexualité au grand jour. Ce choix là est personnel, intime et parfois douloureux et nul n'a
le droit de s'ériger en juge. C'est bien ce choix là, vivre son homosexualité au grand jour, qui d'ailleurs vous pose problème vous qui écrivez : "Qu'ils (les homosexuels)
vivent leurs amours déviantes en privé et soient déjà contents de pouvoir le faire". L'homosexualité ne vous dérange pas à condition qu'elle ne se remarque pas, qu'elle ne s'affiche pas,
qu'elle joue les hypocrites. Et bien ne comptez pas sur moi pour faire semblant, pour prendre femme et jouer la comédie du bonheur côté cour tout en cherchant en catimini des aventures sexuelles
avec des garçons côté jardin ! Si un mari adultère vous paraît moins amoral qu'un homosexuel fidèle c'est que nous n'avons pas tout à fait le même sens de l'amour ni la même conception de la
société... ce qui, sans doute, ne surprendra personne.Et encore, par souci de vous ménager, je ne parle ici que d'homosexualité. Votre conception manichéenne
du monde ne vous permet sans doute pas d'intégrer le concept de bisexualité.
"On ne décide jamais de qui on tombe amoureux."
Il ne m'appartient pas de décider ici si vos écrits sont homophobes ou non. Je laisse à vos rares lecteurs et peut-être aux tribunaux, le soin d'en juger par
eux-mêmes. Néanmoins, je vous plains. Comment peut-on avoir une bonne éducation, une forme de talent et pour autant avoir un esprit si étroit et un coeur aussi sec ? Faut-il que vous n'ayez
jamais connu l'amour pour ne pas comprendre qu'homme ou femme, hétérosexuel ou homosexuel, on ne décide jamais de qui on tombe amoureux ? Naturellement, dans un pays démocratique, chacun a le
droit d'avoir ses propres opinions sur le mariage des couples de même sexe, sur la place de l'homosexualité dans la société, sur les lois contre les discriminations homophobes (lois que par
ailleurs vous vilipendez). Mais est -on réellement obligé de défendre son point de vue avec une telle outrance, une telle vulgarité, une telle haine ? Messieurs, je ne sais pas si les autres
homosexuels vous plaindront. Par contre, je suis sûr que ni eux, ni moi, nous ne vous dirons jamais : "Pardon, nous existons !".
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